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fiche : troubles des conduites alimentaires

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mai

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LIEN
le_culte_de_l_apparence_et_les_troubles_alimentaires

Vous souffrez de troubles des conduites alimentaires (Anorexie, boulimie, obésité) : cette fiche est faite pour vous aider à vous soigner. En dehors du travail psychothérapeutique proprement dit, il est important que vous acceptiez de modifier certaines de vos attitudes. Les propos ci-dessous sont faits pour vous y inciter.

 

QUELQUES RAPPELS

La faim, l’appétit, la satiété sont des phénomènes complexes, où physiologie et psychologie se mêlent. L’homme est une espèce omnivore (qui peut manger de tout et doit à peu près manger de tout) mais qui ne se nourrit pas comme un animal : ce qu’il mange, il ne le dévore pas, c’est à dire que sa nourriture et la façon dont il l’absorbe sont considérablement remaniées par les habitudes sociales ainsi que par ses goûts et habitudes personnels. Aussi les repas sont-ils, dans l’espèce humaine, des moments de convivialité où l’on ne partage pas seulement de la nourriture mais aussi des paroles et des attitudes. Les manières de table sont alors presque indissociables de l’alimentation elle-même. L’anorexie, la boulimie et les troubles des conduites alimentaires en général, sont une déconstruction de l’alimentation humaine. La faim et la satiété ne se contrôlent pas par la seule volonté et il est vain de le faire : cela a pour conséquence en général de défaire tout l’équilibre alimentaire et nutritionnel et de provoquer des troubles psychologiques et physiologiques majeurs. Les troubles alimentaires (anorexie et boulimie) sont la plupart du temps provoqués par la volonté d’exercer un contrôle drastique sur son poids. Or, le poids, comme la faim et la satiété, ne sont pas soumis au contrôle de la volonté. Le poids dépend vraisemblablement d’un pondérostat (chaque individu a un poids de référence qui varie peu au cours de son existence et qui est le résultat de l’équilibre alimentaire, de ses conditions de vie et de quelques autres facteurs souvent incontrôlables). Le pondérostat se modifie avec l’âge (un peu), sous l’action de médicaments ou de maladies, mais il a toujours tendance à demeurer le même, ce qui explique la raison pour laquelle la grande majorité des régimes pour perdre du poids ne servent à rien ou bien entraînent des carences graves de l’organisme. Il est inutile et nocif de vouloir à tout prix changer ce poids de référence, l’organisme mettant tout en oeuvre pour retrouver le poids d’équilibre. A l’adolescence, ce poids d’équilibre n’est pas atteint et la silhouette se modifie beaucoup. Transitoirement, l’allure corporelle peut apparaître comme disgracieuse et mal équilibrée, ce qui est un peu normal tant que la croissance n’est pas achevée. Il est logique et normal de prendre du poids à l’adolescence. Il est en revanche dangereux d’essayer, en contrôlant son poids, de vouloir modifier un aspect physique qui n’est souvent que transitoire et auquel on ne s’est pas encore habitué ; c’est ainsi que peuvent débuter les troubles des conduites alimentaires. On appelle « complexe du homard » (un animal qui en grandissant change de carapace) ce sentiment de malaise devant son corps que l’on éprouve à l’adolescence, il disparaît normalement quelques années après avoir fini de grandir, le temps qu’on se soit habitué à avoir perdu son corps d’enfant.
Les personnes souffrant d’anorexie ou de boulimie veulent contrôler leur poids parce qu’elles pensent que maigrir ou ne pas grossir les rend plus fortes et leur donnent une meilleure estime d’elles-mêmes, leur permettant de se sentir mieux dans leur peau. Mais ce raisonnement s’apparente à celui de quelqu’un qui, ayant perdu ses clefs dans un recoin sombre, se met à les chercher sous un lampadaire parce qu’il y a de la lumière à cet endroit ! Le contrôle ou la chute de poids pour (tenter) de retrouver une meilleure estime de soi vous précipite dans une dépendance alimentaire féroce (on a toute la journée « la nourriture dans la tête ») et vous isole de plus en plus des autres (on ne sort plus de chez soi pour pouvoir faire des crises ou l’on devient trop différent de ses semblables « qui ne peuvent pas comprendre »). Les vomissements provoqués et répétés entraînent une chute du potassium sanguin susceptible de provoquer des troubles cardiaques graves (dont l’arrêt pur et simple du coeur), ils entraînent également une inflammation chronique de l’oesophage et détruisent l’émail dentaire (caries à répétition). Il faut bien savoir que commencer à se réalimenter, surtout quand on est très amaigri(e), fait mal : le tube digestif s’est rétracté et l’alimentation devient douloureuse. Il s’agit d’un cap normal à passer.

 

BUTS DU TRAVAIL THERAPEUTIQUE

Mieux comprendre ce qui favorise les crises et les provoque :

  • On ne devient pas anorexique et/ou boulimique du jour au lendemain, aussi faut-il s’efforcer de comprendre comment on a fini par adopter de tels attitudes.
  • Le thérapeute est à vos côtés pour vous aider à cheminer dans une meilleure compréhension de vos attitudes, il est à même de vous faire passer les caps difficiles que certaines révélations douloureuses sur vousmême peuvent entraîner.
  • Il est important de repérer les cercles vicieux qui favorisent les crises.
  • Il vous faut parvenir à retrouver les émotions, les sensations enfouies en vous et qui sont fréquemment écrasées sous les problèmes alimentaires.

Retrouver un meilleur équilibre alimentaire :

  • En (re)prenant trois repas par jour (et une collation éventuelle vers 16h)
  • En ne mangeant plus rien entre les repas afin d’alterner des phases de digestion et des phases où le tube digestif sera au repos (ce qui n’est pas le cas dans la boulimie où il est sans cesse sollicité) .
  • En mangeant lentement, assis à table.
  • En se donnant un temps de repos après le repas.
  • En reprenant de l’exercice physique régulier dès que ce sera possible.
  • Et, en cas d’anorexie sévère en commençant par accepter dans un premier temps l’objectif de ne pas perdre de poids.

 

SE SENTIR MIEUX PHYSIQUEMENT ET PSYCHIQUEMENT :

  • C’est écouter son corps : ses besoins, ses sensations, la nécessité d’en prendre soin
  • C’est modérer l’hyperactivité (la nécessité constante de bouger et de faire quelque chose).
  • C’est avoir envie de renouer avec ses amis, ses relations.
  • C’est aussi ressentir le besoin de modifier sa vie antérieure et se sentir capable de mettre au clair certaines relations devenues pesantes ou insatisfaisantes.
  • C’est aussi retrouver les sensations gustatives, en particulier la faim et la satiété.

 

CE QU’IL FAUT EVITER :

Tout ce qui maintient l’excitation constante du tube digestif :

  • Les chewing-gums qui provoquent une hypersécrétion permanente de salive.
  • Manger ou boire des boissons autres que de l’eau entre les repas. Aller aux toilettes dès le repas terminé.

Aller aux toilettes dès le repas terminé.
Refuser systématiquement les desserts sous prétexte que « c’est de la gourmandise ».
Se peser tous les jours.
Se regarder dans une glace après chaque repas pour mesurer (imaginairement) les kilos repris.

 

QUELQUES PRINCIPES

L’anorexie, la boulimie, n’ont rien à voir avec des problèmes de diététique, ce sont essentiellement des troubles psychologiques.

L’anorexie, la boulimie et certaines formes d’obésité ne sont pas des pathologies de la nutrition (comme l’est par exemple le diabète) ce sont des maladies du sevrage. (le sevrage c’est réussir à se passer d’un produit toujours le même dont on est dépendant, pour s’ouvrir et découvrir bien d’autres choses du monde…)

Les régimes ne servent qu’à prendre du poids (on reprend très vite plus de poids que l’on en a perdu, à l’arrêt du régime) : des millions d’humains mangent normalement chaque jour et ne prennent pas de poids. Il n’y a aucun « régime miracle », le marché de l’amaigrissement est avant tout celui des charlatans et de bonimenteurs.

Manger normalement ne fait prendre du poids qu’aux personnes amaigries ou carencées.

« Moins on a de nourriture dans le corps, plus on l’a dans la tête ». D’où l’obsession alimentaire des personnes anorexiques.

 

QUELQUE REMARQUES

« Faute de contrôler mes émotions et mes relations, j’en suis réduit(e) à contrôler mon alimentation ».

« Après une crise de boulimie, je ne mange pas au repas suivant puisque j’ai déjà bien trop mangé auparavant » : le meilleur moyen de préparer la crise de boulimie suivante.

Pendant qu’on parle de poids et de calories (qui sont dans une vie humaine des choses assez peu intéressantes), on évite de parler d’autres choses bien plus dérangeantes.

Un « bon repas » ne se juge pas au nombre de calories absorbées, il se juge à la qualité gustative des mets et au plaisir de la compagnie…

« Je ne veux plus maigrir » peut aussi s’écrire : « je ne veux plus m’aigrir ». Etre « gros » n’est pas du tout la même chose que « se sentir gros ».

Les êtres humains ne deviennent pas « indépendants » quand ils sont adultes. Ils ne passent pas de la dépendance de l’enfant à l’indépendance de l’adulte. Les êtres humains adultes sont des êtres interdépendants : ils ont besoin des autres et les autres ont besoin d’eux, c’est ainsi que fonctionne la société, quelle que soit sa forme.

Etre anorexique devient un mode de vie (en fait il s’agit là d’attitudes de survie et non de vie) et de protection par rapport à la vie et aux autres, c’est ce qui explique pourquoi il est si difficile d’en sortir. L’anorexie et la boulimie sont des formes très subtiles de peur et donc de repli sur soi.

La grande devise anorexique : « je m’en sortirai par moi-même ! ». (Ainsi, accepter de se faire aider, demande toujours du courage.)

 

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  1. Cet article est extrêmement bien conçu et criant de vérité. Je me retrouve dans ces descriptions et cela m’a vraiment donné l’envie de consulter pour la première dans ma vie. Merci

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